Imposer des limites au numérique, une nécessité pour protéger la santé physique et mentale des gens et de la Terre
Questions basiques : Est-ce qu’on peut survivre sans GSM ? Déjà c’est quoi la santé ?
Tu me dis numérique et je te dis : la santé c’est d’abord avoir une vie active, une alimentation saine, être debout. Moi je te dis attention, une utilisation mauvaise du numérique, ça joue cash sur le mental : trop de jeux vidéo, jeux online, nervosité, angoisse, isolement, repli sur soi. Et encore : dos courbé, la vue qui baisse.
Alors que les écrans prennent de la place dans nos salons, dans les hôpitaux, un constat devient clair. Il y a des carences dans les services de santé mentale et de l’aide à la jeunesse. Le besoin d’aide grandit. On parle d’assuétude et de détox de numérique, comme pour les drogues.
Moi je pense aux sensations que nous procure le virtuel. Quand tu dépends d’un numéro de dossier médical, de comptes, de machines, d’algorithmes… Quand les personnes qui te soignent sont numérisées et parlent comme un questionnaire à choix multiples, tu te sens handicapé·e, oui. Tu te sens abandonné·e, toujours en attente. Tu peux sentir de fortes colères, de la révolte contre l’exclusion. Et quand au contraire on t’offre un suivi humain, ta maladie commence déjà à être soignée, non ? La santé mentale a un impact sur la santé physique.
Moi je travaille avec des sans-abris. Pas de maison, ça veut dire pas de prise, pas de recharge de batterie. Ils doivent chercher des prises quotidiennement. Aujourd’hui
est-ce que notre corps est dépendant de l’électricité pour bien fonctionner ? Peut-on même survivre sans GSM ?
Est-ce qu’on a le choix ? Cela nous est imposé sans qu’on soit concerté. Ma fille fait tout sur son téléphone. Comme l’école lui demande de l’utiliser, impossible de contrôler son addiction ! Moi je me sens submergée par les messages de mon travail, de ma famille, de mes ami·es. Moi j’ai entendu qu’on allait autoriser les enfants à partir de 6 ans à posséder une carte de banque. Ben oui, comment acheter des bonbons si y a plus de cash ? C’est l’autoroute vers l’endettement. Ce non-choix ça me rend folle, ça me met hors de moi. Je veux avoir le choix, je veux être autonome, je veux garder ma liberté d’action et d’expression. Tout ça, c’est la santé aussi bien sûr !
C’est vrai qu’internet offre aussi une certaine liberté, pour s’exprimer sur la santé par exemple. C’est un espace qui peut faire du bien. Mais avoir trop d’informations mène aussi à ne plus savoir ce qu’on ressent. Et puis il y a les fausses infos, les corps parfaits sur les réseaux. C’est aussi une question de santé. Avec le croisement des données, c’est un cercle vicieux qui s’installe, on reçoit toujours les mêmes images. Nous sommes très vulnérables face aux algorithmes. Nous sommes très vulnérables face à la puissance des images travaillées par des professionnel·les et qui bombardent nos intimités. Bientôt les algorithmes prédictifs de notre santé vont imposer d’autres rapports de pouvoir encore. Liés à l’économie, aux mutuelles… On ressent dans notre corps, pas sur un écran, non ? Le non-verbal, le toucher, l’espace, les odeurs… Faut pas perdre ça de vue.
Quand je demande à ma fille d’aller acheter du lait au night shop et qu’elle me dit : « Oh non, je vais devoir parler à des humains. »… ouais ça m’inquiète pour l’avenir. Y a beaucoup de pression sur les jeunes. Être quelqu’un, trouver sa place, je crois que ça se construit dans le monde, à travers des liens humains réels. Moi ça me fait penser à Robinson sur son île. Il s’est mis à parler avec les ananas.